Les plus anciennes traces de la présence de l'homme au Monténégro remontent à la période de Neanderthal (-100 000 ans). On estime à environ 80 les traces d'habitats humains découverts dans les canyons de la Moratcha. A la lisière de la capitale Podgorica, se situe la Crvena Stijena (Roche Rouge), le site préhistorique le plus ancien avec 31 couches. De nombreuses autres restent encore à découvrir... La fameuse croix en cuivre, datant de 2 000 ans av. J.-C. et découverte à Tuzi près de Podgorica, est l'œuvre des Labeats, une tribu illyrienne.

Quelques kilomètres à l'ouest de Podgorica se trouve l'un des sites archéologiques européens les plus importants: Doclea ou Dioclée. Dioclée fut la plus grande et la plus importante cité de la région à l'époque de l'Empire romain. Nommée ainsi en raison de la tribu illyrienne les Docleats, elle fut fondée vers le Ier siècle dans le bassin de la Zeta (et de la rivière qui porte le même nom). On y retrouve encore aujourd'hui des nécropoles et des vestiges de culture romaine très riches d'inscriptions. Entourée de montagnes, elle fut facilement prenable et ne résista pas aux attaques des Slaves et des Avars.


Fresque datant de l'Age de Bronze (3 000 ans av. J.-C.) découverte dans un souterrain du village de Lipci près de Risan (golfe de Kotor).

Mais c'est sur la côte que l'on trouvera le plus grand foisonnement de richesses archéologiques en raison de l'extraordinaire choc culturel qui s'y est produit: Illyriens, Slaves orthodoxes, Vénitiens catholiques, Grecs,... Budva est la ville la plus ancienne de la côte. Fondée il y a 2 500 ans par les Illyriens, la ville est citée pour la première fois par le tragédien Sophocle au Ve siècle av. J.-C. La plus grande richesse archéologique de Budva provient de la période grecque entre le IVe et le Ier siècle av. J.-C. avec des joailleries et des amphores.


Cette mosaïque d'Hypnos, déesse grecque du sommeil, est exceptionnelle. C'est la seule représentation de cette divinité dans les Balkans.

La localité de Risan dans le golfe de Kotor, est le témoin parfait de la présence romaine. Même si Risan était la capitale de la reine illyrienne Teuta, aucune trace archéologique significative de cette période n'a subsisté. Les trésors archéologiques sont donc romains et datent à partir du IIe siècle ap. J.-C. Les pièces les plus connues sont un buste de l'empereur Domitien et une grande dalle en mosaïque polychrome. Mais c'est la fameuse mosaïque représentant Hypnos, la déesse grecque du sommeil, située juste à côté de la dalle mosaïque polychrome romaine, qui retient le plus l'attention.

Restons dans le golfe de Kotor avec la ville du même nom. Les multiples formes d'architecture ainsi que les fortifications ont valu à cette fondation d'origine illyrienne, mais slavisée à partir du VIIe siècle, de faire partie de la liste de l'UNESCO de l'héritage naturel et culturel mondial. S'y cotôient des cathédrales, des édifices à l'architecture romaine typique de la côte adriatique, des monastères byzantins. En raison de son accès difficile au départ du continent, elle s'est relativement bien défendue face aux barbares et aux Ottomans. Un must du tourisme montenegrin.

Au Sud de l'actuelle côte montenegrine se trouve Ulcinj. Avant de devenir un port de pirates méditerranéens où le commerce et l'esclavage faisaient vivre la cité, Ulcinj était, pendant des siècles avant notre ère, une cité fortement inspirée par la culture hellenique. L'autel du sacrifice dédié au Ve siècle avant J.-C. par les sculpteurs grecs à Artemis, déesse de la chasse, est le vestige le plus important de cette époque. Les inscriptions qui y figurent sont les plus anciennes de toute la côte adriatique orientale.

La région fut donc principalement habitée par les Illyriens. Après plusieurs expéditions punitives contre des pirates locaux, les petits royaumes illyriens sont définitivement conquis par les Romains en 9 ap. J.-C. et annexé à la province d’Illyricum. Plus tard, la ligne de Dioclétien — qui divise verticalement en deux parties égales le Monténégro moderne — divisera l’Empire romain mais aussi les Eglises grecques et latines. Cette séparation symbolisera le statut de cette région, zone magistrale entre les mondes économiques, politiques et culturels slaves et méditerranéens. Durant le déclin de l’Empire romain, cette partie de la côte Adriatique souffrit d’interminables ravages de différents envahisseurs semi-nomades tels les Goths ou les Avars. C'est en 1453 que l'Empire d'Orient s'effondrera avec la prise de Constantinople par les Turcs.


En rouge, la zone d'installation des Slaves au VIIe siècle. En couleurs, l'ex-Yougoslavie. En blanc, les pays issus de l'Ex-Yougoslavie. En noir, la ligne de division de l'Empire romain. L'Empire d'Occident contrôlait le "diocèse d'Illyricum" qui comprenait la Dalmatie et la Pannonie (Hongrie, Bosnie, Dalmatie, Croatie). L'Empire d'Orient contrôlait la "préfecture d'Illyricum" qui comprenait la Prévalitane (Albanie du Nord et Monténégro) et la Mésie supérieure (Serbie).

Au VIIe siècle, ces peuples sont supplantés par les Slaves qui s’établirent largement sur cette partie des Balkans: venant du nord, les tribus slaves s’établirent dans les provinces de Prévalitane ou Prevalis (Monténégro et Nord de l'Albanie), où ils trouvèrent les premiers habitants Illyriens ainsi que les Romains installés principalement dans les villes. Malgré l’hostilité de ceux-ci, les Slaves vont s’installer au Monténégro (ce nom n'existait pas encore à l'époque) et forger un mode de vie slavo-romain, acceptant par exemple de se convertir au christianisme. Plus tard, au sein du royaume byzantin, ils unirent leurs tribus sous le nom de "Scklavinia Doclea" (les Slaves étant autrefois organisés en lignes tribales).





Dioclée: le premier Etat



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